1 août 2016

Homeland


Créateurs : Howard Gordon & Alex Gansa
Avec : Claire Danes, Rupert Friend, Damian Lewis, Mandy Patinkin...
Dates de diffusion : 2011-présent
Pays : USA
Note : ♥♥♥♥♥

"Assad is still in power, ISIS is still growing... 
Are we really getting anywhere in Syria?"

Attention : cette critique comporte des spoilers majeurs sur l'ensemble de la série Homeland ! Continuez votre lecture à vos risques et périls...

Homeland est une série que je voulais critiquer depuis des années, et après m'être à peu près remise du final de la saison 5 (oh god, ce final !) je m'y attelle enfin. Adaptée de la série israélienne Hatufim, Homeland se situe au panthéon de mes séries préférées, tout là-haut avec Twin Peaks et Game of Thrones.

Comme la série comporte déjà 5 saisons, il est évidemment difficile d'en résumer le scénario  d'autant plus que la principale qualité de Homeland est de renouveler ses intrigues au fur et à mesure, évitant de tomber dans la redite ou de lasser le spectateur au fil des saisons. Nous suivons Carrie Mathison (Claire Danes), agent de la CIA spécialisée dans le contre-terrorisme, empêtrée dans une série d'intrigues terriblement palpitantes. La première saison commence avec la libération d'un marine américain, Nicholas Brody (Damian Lewis), qui vient de passer huit ans dans une prison en Afghanistan. Accueilli par la population et le gouvernement comme un héros de guerre et faisant rapidement son chemin jusqu'au Congrès, Brody est rapidement suspecté par Carrie d'avoir été "retourné" et de travailler pour la cause terroriste...

Carrie Mathison (Claire Danes) au Moyen-Orient

Si "l'affaire Brody" s'étend sur les trois premières saisons de Homeland, elle laisse cependant place à d'autres intrigues dans les saisons 4 et 5, où de nouveaux personnages et de nouveaux enjeux font leur apparition (sans que la série en perde son élan, bien au contraire). Au centre de la narration, on retrouve toujours le trio principal de la CIA; composé de Carrie, accompagnée de son mentor Saul Berenson (Mandy Patinkin) et de son collègue et ami Peter Quinn (Rupert Friend), 

Le scénario est comme toujours calqué avec précision sur l'actualité mondiale et la menace terroriste : la saison 4 se déroule en grande partie à Islamabad au Pakistan, ou Carrie poursuit le leader taliban Haissam Haqqani, et la saison 5, qui se passe à Berlin, aborde des sujets tels que la guerre contre l'État Islamique en Syrie, les attentats à l'arme chimique, le piratage informatique à la Edward Snowden ou encore les relations houleuses entre les USA et la Russie. La saison ayant été diffusée au moment des attentats du 13 novembre à Paris, elle fait plus que jamais écho à l'actualité, avec un réalisme extrême plutôt effrayant.



Saul Berenson (Mandy Patinkin)

L'un des aspects particulièrement appréciables de Homeland est la complexité et l'ambiguité de ses propos et de ses personnages. On est loin des productions américaines ou les gentils Américains sauvent le monde des méchants Arabes terroristes, avec une bonne dose de manichéisme nationaliste. Homeland ne présente pas les agents de la CIA comme des héros, et prend le temps de développer les personnages terroristes afin de leur donner du relief (sans pour autant excuser leurs actes). Carrie Mathison elle-même n'hésite pas à semer des cadavres sur son chemin pour parvenir à ses fins, et ses actions sont régulièrement présentées comme hautement contestables  "So many people, so much blood on your hands... I don't know how you live with yourself", accuse son petit ami Jonas, dégoûté. La force du personnage de Carrie réside dans cette dualité – intelligente, forte et courageuse, mais également obsessionnelle et impitoyable (pour ne rien arranger, Carrie est bipolaire et sous traitement médical...).


L'autre grande qualité de Homeland, c'est son suspense. Chaque épisode est truffé de révélations, de surprises et retournements de situation qui nous donnent une envie irrépressible de regarder le suivant ; les cliffhangers de fin d'épisode sont souvent au rendez-vous. Jamais des sujets d'actualité ne m'auront autant passionnée (mine de rien, j'ai beaucoup appris sur la politique étrangère en regardant Homeland, moi qui ne regarde jamais les infos...). De plus, comme le font bon nombre de séries ces jours-ci, la série n'hésite pas à éliminer certains de ses personnages principaux au beau milieu de l'histoire – rendant le suspense encore plus insoutenable, sachant que tous les protagonistes peuvent mourir d'un instant à l'autre... 



Carrie et Brody (Damian Lewis)

La saison 3 de Homeland a frappé particulièrement fort en éliminant brusquement LE héros principal aux côtés de Carrie, Nicholas Brody, que l'on suivait depuis le tout début (au point que les spectateurs étaient persuadés qu'il n'était pas vraiment mort et ferait son retour dans la saison 4... Que nenni !). Si cette fin de saison a laissé de nombreux spectateurs perplexes, voire outrés  comment la série pourrait-elle bien continuer sans Brody ? Tout tournait autour de lui ! –, Homeland a parfaitement su rebondir, plus palpitante que jamais dans ses saisons 4 et 5. 


Et le final de la cinquième saison de nous asséner à nouveau un grand coup, avec un cliffhanger insupportable sur le sort d'un autre héros de la série : Peter Quinn, laissé dans le coma entre la vie et la mort après un empoisonnement au gaz sarin... Sachant que Homeland n'est pas frileuse quand il s'agit de tuer sans vergogne ses personnages principaux, le risque est gros et l'attente de la saison 6 interminable. Pire que le "Red Wedding" de Game of Thrones ! (Quelle idée, aussi, de s'attacher autant à tous ces personnages de série...)

Carrie (incognito sous une perruque brune...) et Quinn (Rupert Friend)

Côté casting, il n'y a rien à redire, les performances sont excellentes. Le jeu de Claire Danes, très riche et nuancé, colle parfaitement à la diversité des émotions et des sentiments qui habitent Carrie ; tous les autres protagonistes (Saul, Quinn, Brody, Dar Adal, mais aussi les personnages de terroristes  Abu Nazir, Haqqani, Bibi Ahmed) sont joués avec justesse et réalisme sans jamais tomber dans la caricature. J'apprécie tout particulièrement le fait que, dans cette recherche de réalisme justement, Homeland ne soit pas tournée uniquement en anglais : on y parle souvent arabe, russe ou allemand, et pas seulement l'espace de quelques répliques ans importance, "histoire de". De nombreuses scènes sont tournées exclusivement dans une langue étrangère lorsque le contexte le justifie, et heureusement : rien de plus irritant, en effet, que d'entendre des personnages syriens ou russes parler un anglais parfait entre eux... La saison 5, notamment, comprend un grand nombre de scènes-clés tournées en allemand, puisque l'action se déroule à Berlin et que la majorité des personnages est allemande.

Homeland est donc une série prenante, réaliste et extrêmement bien écrite, laissera le spectateur se faire happer par son suspense habilement dosé et une galerie de personnages aussi attachants que complexes. Une excellente série d'action doublée d'une réflexion sur des problématiques d'actualité (la menace jihadiste en tête), Homeland n'hésite jamais à surprendre, choquer, se renouveler  une audace qui lui promet encore bien des saisons palpitantes... À voir absolument !