27 novembre 2010

LOL


Réalisatrice : Lisa Azuelos
Avec : Christa Theret, Sophie Marceau, Jérémy Kapone, Lou Lesage...
Date de sortie : 2008
Pays : France
Note : ♥♥

"Dis Julien, je voulais te demander un service...
Tu veux pas qu'on fasse l'amour ?"

LOL, c'est une abréviation ultra-utilisée par les ados du monde entier, qui ignorent pour la plupart sa signification réelle : "laughing out loud". LOL, c'est aussi le surnom de Lola, héroïne de 15 ans du film éponyme de Lisa Azuelos. La réalisatrice est surtout connue pour sa gentille comédie spéciale filles, Comme t'y es belle, sortie en 2006.

L'histoire de LOL ? Difficile à raconter, car l'intrigue est inexistante. Il s'agirait plutôt d'une série d'instantanés dans la vie d'adolescents parisiens, issus d'un milieu aisé. Lycée, amis, amours, premiers émois sexuels, drogue (gentiment, tout de même), parents plus ou moins conciliants... On suit donc Lola (Christa Theret) dans ses aventures avec sa bande de potes, ses révisions de brevet, ses galères avec son petit copain, ses relations avec sa mère (Sophie Marceau). Sans rebondissements ni début ni fin, le scénario nous entraîne simplement dans le quotidien de ces ados comme tous les autres.

Les critiques avaient, pour beaucoup, encensé le film pour son parti pris soit-disant original et décalé. Si parfois on ressent cette volonté dans LOL, elle n'est pas du tout assez aboutie, et c'est le majeur défaut du film. Celui-ci se veut visiblement original, fonctionnant sur l'autodérision et l'humour lié au genre de la comédie romantique. À l'image de la scène d'ouverture, où trois adolescentes arrivent au lycée, filmées au ralenti et cheveux au vent... et où la voix-off de Lola nous annonce que "Là, on est au ralenti parce que dans les séries américaines, quand les plus belles meufs du lycée arrivent, elles sont toujours au ralenti"... Ou cette scène un brin mélodramatique où les deux meilleurs potes sont sur le toit et s'avouent leur amitié indéfectible à grands renforts de pathos... jusqu'à ce que l'un d'eux fasse remarquer que "là, ça fait un peu la séquence pathétique, genre les deux meilleurs potes sont sur le toit et tout..." De temps à autre, la réalisatrice parvient à jouer sur les codes du genre et à donner un ton décalé au film.

Le problème, c'est que souvent, trop souvent, LOL retombe exactement dans ce qu'il s'efforce de parodier. Et c'est justement parce qu'il essaye de s'en détacher que ça en devient doublement ridicule... Nous avons malheureusement droit à moult moments totalement clichés, que d'autres films ont beaucoup mieux réussi à éviter : personnages déprimés pleurant sur une musique triste, flashbacks des moments joyeux défilant au ralenti... Histoires d'amour faussement finies pour toujours, puis les deux intéressés se jetant dans les bras l'un de l'autre... Père de l'un des ados, coincé et autoritaire, qui finit par se rendre compte du talent musical de son fils jusqu'à en pleurer d'émotion... Du coup, les scènes "parodiques" paraissent artificielles, forcées, comme pour s'excuser de ne pas avoir réussi à faire un film réellement original.

Les personnages, même si certains sont attachants, n'évitent pas non plus les stéréotypes. Les parents comme les ados sont divisés en catégories : la "pouffe" vulgaire et qui couche avec tout ce qui bouge, le "beau gosse" dont toutes les filles sont folles, le musicien amateur de guitare et de pétards, le fils de ministre au nom composé et au physique ingrat... Côté adultes, il y a la mère tendance qui s'habille et parle comme sa fille de 15 ans, les parents stricts et coincés qui ne permettent rien à leurs enfants, le prof de maths jeune et canon qui fait rêver la gent féminine... Chacun de ces personnages évolue exactement comme on s'y attend, jusqu'au happy end général.

L'autre gros défaut de LOL est que Lisa Azuelos oscille entre plusieurs genres ; ce qui fait que finalement, aucun d'eux n'est suffisamment abouti. Le film se veut drôle, mais les scènes où l'on rit vraiment sont rares. Le plus souvent, on sourit vaguement, non pas à cause du scénario mais à cause des souvenirs que la vision de ces ados suscite chez nous. Les moments romantiques sont présents, trop pour les spectateurs qui espéraient quelque chose de différent, mais pas assez pour satisfaire les amateurs du genre. Les moments tristes viennent ponctuer le tout de façon extrêmement prévisible...

La qualité du film réside dans ses interprètes, naturels et convaincants. Mention spéciale à la toute débutante Christa Theret, qui porte le film sur ses épaules et joue à la perfection l'ado-type qu'est Lola. Les autres acteurs adolescents sont plus ou moins bons - l'une d'elles, Lou Lesage, a toutefois un niveau bien inférieur à celui de ses comparses. Chez les adultes, on retiendra particulièrement la prestation d'Alexandre Astier (souvenez-vous, le roi Arthur de Kaamelott) dans son rôle de père divorcé, et celle, drôle et décalée, de Françoise Fabian dans celui de la grand-mère aussi inquisitrice qu'adorable. 

Quant à Sophie Marceau - le principal argument commercial du film lors de sa sortie - je ne l'ai pas trouvée si exceptionnelle que ça. Certes, son jeu est naturel et crédible en mère de famille partagée entre ses responsabilités d'adulte et ses envies de se comporter en ado immature... Mais personnellement, je l'ai trouvée plus agaçante qu'attachante. À croire quelle n'a toujours pas réussi à se détacher de son personnage de La Boum, qui l'avait rendue célèbre vingt-cinq ans plus tôt. Sa façon de parler résolument "jeune", sa relation "meilleure copine" avec sa fille, le tout a tendance à irriter. Elle tire tout de même son épingle du jeu lors de certaines scènes plus noires, dans lesquelles elle parvient davantage à s'imposer que dans le registre de l'humour léger.

LOL est donc un film sans aucune surprise, comme on en a déjà vu des dizaines. Les amateurs de feel good movies apprécieront - ceux qui espéraient un film original seront déçus. À voir uniquement pour la justesse de certaines scènes, dans lesquelles parents et ados se retrouveront.

11 novembre 2010

Iron Man


Titre original : Iron Man
Réalisateur : Jon Favreau
Avec : Robert Downey Jr., Gwyneth Paltrow, Jeff Bridges, Terrence Howard...
Date de sortie : 2008
Pays : USA
Note : ♥♥♥♥♥

"Yeah, peace ! I love peace. I'd be out of a job with peace." 

Non, vous ne rêvez pas : j'ai bien accordé cinq ♥ à un film américain 1) d'action, 2) de super-héros. Je ne pensais pas que ça arriverait un jour... Il faut savoir que je suis absolument pas fan de films de super-héros. J'ai beau chercher, je ne trouve pas d'intérêt à regarder ces films fonctionnant éternellement sur le même scénario, les mêmes personnages stéréotypés, le même super-héros superpuissant contre le super-méchant superpuissant aussi. Généralement, je fuis à l'annonce d'un film se terminant en -Man, qu'il soit Super-, Bat-, Spider-, ou, donc, Iron-.

Et voilà que ce dernier, dont je n'attendais rien de plus qu'un blockbuster cliché au goût de déjà-vu, me surprend au point de lui coller la note maximale... Il faut dire qu'Iron Man est aux antipodes de tous ses prédécesseurs.

Le film est tiré, comme beaucoup de films de super-héros, des comics américains Marvel. Le personnage d'Iron Man, en l'occurence, est apparu pour la première fois dans le magazine Tales of Suspense en 1963. Le jeune réalisateur Jon Favreau - jusqu'alors totalement inconnu au bataillon - a librement pioché dans les diverses aventures de l'homme en armure de métal rouge et or pour en concentrer le meilleur sur deux heures de film.

L'histoire ? Celle de Tony Stark (Robert Downey Jr.), playboy multimilliardaire et bricoleur de génie qui gagne sa croûte en vendant des armes. Lors d'un voyage d'affaires en Afghanistan, où il doit faire la promotion de son nouveau missile, Stark est attaqué par un groupuscule terroriste qui le prend en otage et lui fournit le matériel nécessaire pour construire, pour les besoins du groupe, le fameux missile dont il était venu vanter les mérites. Faisant mine d'accepter, Stark se fabrique en réalité une armure métallique qui lui permet de s'échapper des mains des terroristes.

Une fois de retour aux États-Unis, Tony crée le scandale en annonçant la fermeture de la branche Armement de sa compagnie, Stark Industries, afin de se consacrer pleinement au développement de son armure révolutionnaire. Décision qui n'est pas au goût de son ami et collègue de longue date, Obadiah Stane (Jeff Bridges), avec lequel il commence à avoir des divergences d'opinion importantes...

Difficile d'aller plus loin sans spoiler une grande partie du film. Et pourtant, ces événements ne constituent que le début d'Iron Man, suivis par une série de péripéties, de retournements de situation et de révélations dignes d'un excellent thriller.

Alors, qu'est-ce qui fait de cet énième film de super-héros une œuvre à part, largement considérée par le public et la critique comme la meilleure adaptation de Marvel jamais réalisée ? Le plus simple est sans doute d'argumenter point par point, en soulignant tous les contrastes qui existent entre Iron Man et ses prédécesseurs et qui placent le film bien au-dessus de ces derniers...


1. Iron Man n'est pas un super-héros. 
 
Oui oui, vous avez bien lu. Contrairement à ses congénères, Tony Stark est un homme comme vous et moi. Point de modifications génétiques, point d'habilité naturelle à voler en brandissant le poing en l'air, point de bave d'araignée radioactive au bout des doigts. Iron Man est simplement Tony Stark vêtu de son armure, une armure qu'il a construite de toutes pièces. 
La seule chose qui différencie Stark du commun des mortels est le "Arc Reactor", sorte de pacemaker lumineux et high-tech qu'il a sur la poitrine (lors de son attaque en Afghanistan, il est blessé par des éclats d'obus, et le seul moyen de le maintenir en vie est de lui implanter une source d'énergie qui empêchera les éclats de pénétrer dans son cœur). C'est cette source d'énergie super-puissante qui servira de moteur à l'armure. Encore une fois, il s'agit uniquement de technologie créée des mains de l'homme, et pas d'un super-pouvoir inné. C'est ce qui rend le personnage intéressant : ses origines sont explicitées de A à Z, dans un registre parfaitement réaliste, et rien n'est considéré comme acquis dès le début du film. On assiste à la transformation de Tony en Iron Man, et on y croit. Le fantastique est totalement absent du film.

2. Tony Stark n'a rien du héros classique.
 
Lors de la création du héros en 1963, les deux auteurs du comic sont partis d'un pari un peu fou : faire apprécier aux jeunes lecteurs un personnage qui, à l'origine, n'a rien de sympathique. Jon Favreau a manifestement adopté la même démarche. En effet, le Tony Stark du début du film - avant sa capture en Afghanistan - n'a rien de l'habituel héros pour lequel on éprouve de l'empathie dès les premières minutes... Stark, fils de milliardaire, dirige une compagnie qui fabrique et vend des armes. Il n'a aucun scrupule, est heureux de pouvoir vendre sa marchandise aux pays en guerre, est sincèrement persuadé qu'il agit pour le plus grand bien de l'humanité. Stark est un playboy content de lui, parfois arrogant, qui profite et abuse de son statut de multimilliardaire. Stark couche avec tout ce qui bouge, ne respecte rien ni personne. Il est la personnalisation du capitalisme extrême. Il est à mille lieux des héros bons, droits et honnêtes auxquels Marvel nous avait habitués. A priori, on a plutôt envie de lui filer des baffes.

Et pourtant... Pourtant, dès le début, son excentricité et son humour cynique suscitent l'intérêt. Et plus il évolue dans le film, plus on l'aime. Forcément, les trois mois passés en captivité vont transformer notre homme, qui en vient à réaliser que ses propres armes servent à massacrer des innocents et qui va dès lors refuser de continuer son business de la mort... Tony n'a cependant rien du vu et revu héros sombre et torturé, sérieux comme un pape, déchiré entre ses super-pouvoirs et son aspiration à une vie normale... Ici, Stark est fier de son invention, ne cherche pas à la cacher et joue sur sa notoriété.

Même physiquement, Tony Stark n'a rien du super-héros tel qu'on le connaît. Pour une fois, pas de jeune premier de tout juste 25 ans dans le rôle du héros. Pas de bellâtre dont le principal but est d'attirer la gent féminine. Robert Downey Jr. a plus de 40 ans, mesure 1m70 et n'a pas vraiment le physique de l'emploi. Ce qui le rend infiniment plus attachant que ses compatriotes (Tobey McGuire, Christopher Reeves et consorts). Le jeu de l'interprète joue évidemment en sa faveur, et rapporte à Downey Jr. l'award mérité du Meilleur Acteur.

3. Iron Man est dépourvu d'une histoire d'amour.

Encore une fois, ça peut sembler difficile à croire. En général, la romance entre le héros et sa demoiselle en détresse est LE point clé des films de super-héros. On ne connaît pas Spiderman sans sa Mary-Jane, ni Superman sans sa Lois. Et pourtant... Pas de relation amoureuse dans Iron Man. Tony Stark met tout un tas de jolies nanas dans son lit, mais les abandonne le lendemain matin. Le personnage féminin existe bien, certes, en la personne de Pepper Potts (Gwyneth Paltrow), l'assistante personnelle de Stark. Mais Pepper n'a strictement rien à voir avec ses consœurs, elle non plus. Elle n'a rien de la demoiselle en détresse qui pleure et hurle et que le héros doit sauver. 

Pepper est un personnage extrêmement original et complexe. Sa relation avec son patron est faite d'amitié, de confiance,  de rires (parfois), d'exaspération (souvent), mais pas d'amour. On attend (ou on craint) la romance, le classique baiser au clair de lune, mais il ne viendra pas. Et ça, c'est tellement rafraîchissant... Je tire mon chapeau à Jon Favreau pour avoir osé supprimer la romance de son blockbuster. Beaucoup ont déploré l'absence d'une relation amoureuse ; pour ma part, je considère que c'est quasi-révolutionnaire, tant on a systématiquement droit au schéma "Ooh, je t'aime, moi aussi je t'aime". Et pas que dans les films de super-héros. Bravo, Jon. 

4. Iron Man mise sur le réalisme.
 
Le réalisateur a manifestement désiré créer un film le plus réaliste possible, un film auquel on croit. Il a volontairement ancré son film dans une réalité très actuelle. Là où le comic de 1963 montrait un Tony Stark blessé et capturé dans un Vietnam déchiré par la guerre, Favreau place l'action en Afghanistan, et remplace le méchant asiatique communiste par un groupuscule terroriste tendance Al-Qaida. Le film est agrémenté de nombreux extraits de journaux télévisés, de magazines existant réellement, de citations de marques réelles, d'une vidéo de Tony pris en otage qui ressemble exactement à celles qu'on peut voir à la télévision. Le cadre spatio-temporel est précis, jusqu'au jour et à l'heure près. 

Mais surtout, le réalisme du film provient de l'usage fait de la technologie. Étant donné que Tony/Iron Man est un homme normal dont les seuls "pouvoirs" sont conférés par son armure high-tech, il était essentiel que la technologie utilisée soit crédible. Et elle l'est. On assiste à la fabrication de l'armure et du Arc Reactor point par point, et on a l'impression qu'il est tout à fait plausible de créer de tels objets dans la réalité (alors que, à ce que je sache, nos ingénieurs ne sont pas près d'inventer une technologie aussi efficace - mais on y croit dur comme fer !). 

Iron Man nous plonge dans un monde d'hologrammes interactifs, de robots dirigés par la voix humaine, de personnages virtuels tels que l'intelligence artificielle nommée JARVIS (dont la voix est celle, so british, de Paul Bettany) qui sert d'interlocuteur sarcastique à Tony lorsque ce dernier travaille dans son atelier. On en vient à se passionner pour sa façon de bidouiller, souder, scier, tripoter LEDs et accélérateurs de particules d'une main de maître - et pourtant, je suis loin de m'intéresser à ce genre de technologie... À ma connaissance, Iron Man est le seul film de super-héros totalement dépourvu d'éléments fantastiques.

5. Iron Man est un "film d'origines".
 
Que signifie ? Généralement, les films de super-héros sont des films d'action, dans lesquels on nous présente un personnage déjà actif, déjà habitué à son statut à part, qui va vitre diverses super-aventures. Or, lorsque le film s'ouvre sur Stark, il n'est pas encore le Iron Man du titre. Il faudra attendre une heure avant qu'il revête pour la première fois son armure. Pendant cette heure, on assiste à son évolution, à la fabrication de son armure pendant sa captivité, à son perfectionnement une fois rentré aux États-Unis. Le film s'attache davantage à expliquer pourquoi et comment Tony devient Iron Man que de montrer ce dernier en action...

De fait, au fond, on voit rarement Tony Stark dans son armure. Le temps total pendant lequel Tony "est" Iron Man ne doit pas dépasser les 20 minutes... Le coup de force de Jon Favreau est de créer un personnage si intéressant que le spectateur préfère presque le voir en tant que Tony Stark plutôt qu'en tant qu'Iron Man. Une première dans un film de super-héros. Jusqu'à présent, personne ne s'intéressait à la vie de Bruce Wayne hors de son costume de Batman, ni à celle de Peter Parker sans sa combinaison de Spiderman. L'intérêt de ces héros consistait uniquement dans leurs super-pouvoirs. En revanche, Favreau pourrait bien tourner un Iron Man entier sans montrer une seule fois Tony enfiler son armure, le film resterait tout aussi passionnant. La complexité et l'ambivalence du personnage suffiraient à alimenter un excellent long-métrage. Si quelques fanas d'action ont regretté le manque de bagarre, la plupart ont apprécié le côté plus psychologique du film.

6. Le méchant n'est pas seulement un méchant.
 
Chaque super-héros a son adversaire, c'est bien connu. Chaque personnage combat sa Némésis, un super-méchant à la hauteur se ses pouvoirs hors du commun. En général, cet ennemi est désigné dès les premières minutes du film, et ne'évolue pas tellement au cours de l'action. 
L'ennemi de Tony Stark déroge à cette règle. Obadiah Stane, en effet, est à l'origine un très bon ami et associé de Tony, qui travaillait déjà avec le père de celui-ci avant que Tony ne prenne la direction de Stark Industries. Jovial et bon enfant, Obadiah bénéficie de la confiance totale de Stark, qui le considère presque comme une figure paternelle. Mais Stane cache bien son jeu, et à mesure que le film avance, on comprend que non seulement l'homme n'est pas si honnête qu'on le croit, mais que c'est lui en personne qui a commandité l'assassinat de Stark en Afghanistan... Cette révélation n'apparaît qu'à la fin du film, servant de déclencheur au duel final entre les deux personnages. Obadiah Stane subit autant que Tony une évolution radicale, et demeure, de très loin, le "méchant" le plus intéressant des comics Marvel.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce qui fait d'Iron Man un film si différent de ses congénères... Retenons aussi, évidemment, la prestation exceptionnelle des acteurs principaux. Robert Downey Jr. est parfait en milliardaire excentrique qui voit ses convictions s'écrouler, son jeu est d'un naturel désarmant. Jeff Bridges apparaît dans un rôle à l'opposé de ses personnages habituels, et nous livre un impressionnant Obadiah Stane froid et calculateur sous ses airs de bon copain. Terrence Howard est sobre mais efficace dans le rôle de James Rhodes, colonel dans la Air Force et ami de Tony Stark.

Mention spéciale enfin à Gwyneth Paltrow, qui interprète le seul personnage féminin du film, Pepper Potts... Je n'ai jamais aimé Gwyneth Paltrow, mais sa prestation me pousse à changer d'avis. Elle aussi est parfaite dans le rôle de cette femme loin de tous les clichés (ni super-woman, ni demoiselle en détresse, donc), qui tempère les excentricités de Tony et lui est d'une aide et d'une dévotion précieuses. 

Les personnages secondaires sont eux aussi suffisamment développés pour les rendre intéressants, que ce soit  Yinsen, le chirurgien captif qui sauve la vie de Tony en Afghanistan et qui l'aidera à construire son armure (l'excellent acteur iranien Shaun Toub) ou le chef des terroristes, Raza (Faran Tahir). Notons la présence de Jon Favreau lui-même, qui joue Happy Hogan, le chauffeur de Tony - avec ce petit rôle, le réalisateur prouve qu'il est également doué pour la comédie.

Le film est en outre dynamisé par un montage énergique et intelligent, des ambiances travaillées (depuis les cavernes afghanes jusqu'à l'atelier futuriste où travaille Stark) et une bande originale mélangeant musique de film "traditionnelle" et morceaux contemporains choisis avec soin - dont le célèbre et très approprié Highway to Hell en ouverture du film, alors qu'on voit le convoi de jeeps s'enfoncer dans les montagnes d'Afghanistan... C'est en effet exactement en enfer que se rend sans le savoir le héros.

Un film unique en son genre par bien des points, loin de toutes vos idées reçues sur les super-héros. Scénario à rebondissements, casting impeccable, personnages développés à merveille... Iron Man vous fera oublier tous les autres -Man qui existent. What else ?

10 novembre 2010

Sherlock Holmes


Titre original : Sherlock Holmes
Réalisateur : Guy Ritchie
Avec : Robert Downey Jr., Jude Law, Rachel McAdams, Mark Strong...
Date de sortie : 2009
Pays : USA
Note : ♥♥♥♥ 

"Holmes ! Does your depravity know no bounds ?"

J'avais découvert les romans de Conan Doyle toute jeune, lorsque mon père me les lisait avant de me coucher, et je n'y avais pas touché depuis. Sherlock Holmes, personnage pourtant mythique s'il en est et adapté de multiples fois sur grand écran, m'était donc relativement méconnu - si l'on exclut un ou deux téléfilms qui ne m'ont pas du tout laissé un souvenir impérissable. Aussi, je ne sais pas trop à quoi m'attendre de la part de ce film, dont j'avais eu des critiques contradictoires...

Ici, Sherlock Holmes (Robert Downey Jr.) et son fidèle associé John Watson (Jude Law) commencent par la fin, en résolvant une enquête dans les cinq premières minutes du film : ils parviennent enfin à arrêter le serial killer Lord Blackwood (Mark Strong), connu pour faire usage de magie noire. Alors que le criminel est condamné à la pendaison et que Watson est sur le point de déménager loin de Londres - et de Holmes -, le duo est informé que Blackwood est revenu d'entre les morts et poursuit ses meurtres sanglants à travers la ville... Watson reporte alors son départ pour tirer l'affaire au clair avec son ami à la logique implacable. Au même moment ressurgit dans la vie de Holmes une mystérieuse femme, Irene Adler (Rachel McAdams)...

J'ignore à quel degré le scénario est fidèle à l’œuvre de Doyle (il est fort possible que les scénaristes aient mixé un ensemble d'éléments piochés à droite et à gauche plutôt que d'adapter fidèlement l'une des aventures du détective) mais il est suffisamment bien construit pour maintenir le spectateur en haleine durant les deux heures que dure le film. Construit à la manière d'un thriller, il nous invite à résoudre l'enquête en même temps que les héros, jusqu'à un final qui, sans être extraordinaire, reste tout à fait crédible.

La qualité du film ne réside cependant pas dans son intrigue somme toute assez classique, mais plutôt dans ses deux personnages principaux, qui crèvent l'écran, portés par deux acteurs au meilleur de leur jeu. À la fois opposés et complémentaires, ils ne cessent de se chamailler tout en étant inséparables. Chacun de leurs dialogues est un délice, les deux personnages possédant un sens de l'humour et de la répartie grandiose. 

Jude Law interprète à merveille un Watson pince-sans-rire, faussement coincé et continuellement exaspéré par les frasques de son associé. Robert Downey Jr. (qui a adopté avec succès l'accent anglais pour l'occasion), lui, est parfait dans le rôle d'un Sherlock Holmes alcoolique, excentrique, bordélique mais redoutablement efficace lorsqu'il s'agit de déductions et de logique. Le rôle a valu à Downey Jr. un Golden Globe amplement mérité. Sans aucun doute, ce sont les deux héros qui font le charme du film. 

Certains amateurs de l’œuvre de Doyle ont certes déploré l'impasse faite par le cinéaste sur le sous-entendu homosexuel qui relie Holmes et Watson dans les romans - je ne peux pas en juger, n'ayant pas lu les livres, mais je trouve leur relation suffisamment intéressante et complexe sans y ajouter de tension sexuelle. Ici, c'est Irene Adler qui fait office de vamp sulfureuse et insaisissable, alors que Kelly Reilly interprète la fiancée sage et rangée de Watson. J'ai cependant apprécié le fait que le film ne tombe jamais dans la solution facile de la romance entre Holmes et Irene - leur relation est infiniment plus complexe et jamais cliché.

Autre point fort du film : la musique. Plutôt que l'habituelle et attendue musique typique du film d'action, Guy Ritchie choisit de donner à la bande originale une tonalité de musique folklorique irlandaise, qui convient à merveille à l'ambiance du Londres de début de siècle. Déroutante an début, la musique ajoute ensuite une touche originale au film. Les décors sont également splendides, nous dévoilant les bas-fonds crasseux d'un Angleterre victorienne. Les costumes sont tout aussi soignés, des riches robes portées par Irene Adler aux vestes usées et râpées de Sherlock Holmes.

Une fois n'est pas coutume, j'ai aussi beaucoup apprécié les scènes de combat du film. Encore une fois, le jeu de Robert Downey Jr. y est pour beaucoup. Loin d'être un Action-Man redoutable, héros valeureux qui maîtrise ses ennemis les mains dans les poches, Holmes utilise une technique de combat à mains nues plus absurde que dangereuse, se défendant comme il peut, à coups de petites claques sur le nez plutôt que grâce aux habituels coups de poing. Les scènes de combat deviennent ainsi drôles et décalées, sans jamais être ridicules.

Sherlock Holmes offre ainsi un très bon divertissement, qui, sans être pourvu d'un scénario mémorable, permet à ses deux comédiens de s'en donner à cœur joie et de nous livrer une interprétation jamais vue du célèbre duo d'enquêteurs, ajoutant une dimension comique au film. À voir !

Note : le succès du film aidant et Hollywood étant friand de suites, un second volet est prévu pour 2012.